Il y a des jours comme ça où c'est absolument pas le moment.
J'aurais tout donné pour que ce coup de file n'arrive pas. Pour ne pas l'entendre ou pour ne pas avoir eut mon portable dans ma poche ou pas de réseau ou n'importe quoi d'autre. Quoi que ce soit qui m'aurais empêchée de prendre cet appel. Mais ce ne fut pas le cas évidemment. Reconnaissant la sonnerie attribuée au restaurant et sachant parfaitement que mes collègues étaient bien trop respectueux pour m'appeler lors d'un de mes jours de repos sans véritable raison, je décrochais.
C'était Lim Bo Ra, l'un des serveuses du Samwon. Cela ne me surprenait pas tant que ça, après tout en mon absence il n'y avait pas vraiment de grade, mise à part le directeur du restaurant au dessus de moi... Mais lui c'est un peu particulier. Un vrai en fait pour tout vous dire. Ce gars est juste à cette place parce qu'il est le fils de celui qui gère la filiale de Samwon. Je n'arrive pas à me faire à l'idée qu'une des têtes pensantes de là haut est était assez futée pour le placer à la tête du restaurant. Même en étant juste manager, j'étais mieux placée que lui pour diriger la boutique. Incompétent, désintéressé, immature, sans savoir vivre, comment quelqu'un pouvait collectionner autant de tares ? En un certains sens, ça se respecte les gens comme ça, qui n'ont à ce point pas le sens des responsabilités. Mais c'est pas mon cas. Je ne peux absolument pas laisser du boulot non fait ou mal fait derrière moi, question de principe. Je ne pouvais donc pas ne pas décrocher le téléphone. Car pas possible de compter sur mon supérieur, la boutique devait bien être veillée par quelqu'un. C'était juste regrettable de briser un si bon moment. Mais je fis quand même, m'excusant auprès de la personne qui me tenait compagnie pour décrocher le téléphone.
«
Manager Seong, j'écoute. »
Au ton de Bo Ra, je sus directement que quelque chose n'allait pas du tout. Pressée, gênée et stressée. Le stress, nous y faisions face tout le jour au boulot. Mais un stress bien géré, comme re-traité pour le ré-employer de façon positive. C'était ce petit stress permanent qui permettait à l'équipe d'être aussi efficace, toujours à cent pour cent, satisfaisant au maximum la clientèle. Non, là le stress dans la voix de Lim Bo Ra s'apparentait plus à un début de peur ou de panique. Et visiblement, elle n'avait pas le temps de m'expliquer en long et en large d'où venait le problème. Elle m'expliqua juste qu'un client était la source de son soucis. Je n'eus à peine le temps de lui promettre d''arriver au plus vite que la serveuse du Samwon avait déjà raccroché.
Étrange. Pour ne pas dire inquiétant. La peur est naturellement communicative, comme le rire. Et je suis une sorte de réceptacle à peur, ça en est presque magique. Il faut que j'y aille, je peux pas les laisser seuls sans moi. Je jète un coup d'oeil dans la pièce et abandonne avec grand regret l'idée de poursuivre un doux après-midi dans cette pièce en sa compagnie. Je m'excuse. Je dois y aller.
Je regagne mon appartement à l'autre bout du couloir tandis que mon visage s'assombrit légèrement. Je cherche ce qui peux bien exiger ma présence et faire perdre à Bo Ra son calme habituel. Je cherche, mais je ne trouve pas. J'abandonne donc cette idée, me concentrant sur la tenue que je dois mettre. Pas question d'arriver au travail en jean, une manager dois être une manager quoi qu'il arrive. Et cela inclue de bien présenter. Mais je ne perd pas trop de temps avec ça. J'enfile rapidement une des tenues que j'ai déjà assemblées sur un cintre. Un haut blanc, un tailleur bleu cyan et une veste blanche par dessus le tout. Ça suffira amplement ; cela me prend quoi... Trois minutes ? Encore une supplémentaire pour choisir et enfiler une paire d'escarpins toute simple. Une minute trente le temps d'ouvrir la porte de la salle de bain, vérifier ma coiffure et mon maquillage, attraper une paire de boucle d'oreille d'une main et de l'autre mes clefs et mon sac à main. Okey... Ready and... Let's go !
Une fois dans ma voiture, j'essaye de faire attention aux limitations de vitesse. Et au reste également. C'est pas en atterrissant à l'hôpital que je serais plus efficace. Enfin je dis ça mais ça m'empêche pas d'enfiler mes boucles d'oreilles tout en conduisant. L'esprit de contradiction ?
Il me faut environ quinze minutes pour aller de chez moi à Samwon. Mais à cette il y a moins de monde sur la route et au final, le trajet m'as pris que onze minutes. Tant mieux, n'est-ce pas ? Comme toujours, je me gare derrière le restaurant. Je veille à bien refermer le porte de la voiture et file vers l'entrée du staff. Certes, la porte principale étant ouverte, j'aurais pu m'offrir le luxe d'y passer pour une fois mais pas question. Les habitués auraient été sans doute surpris de me voir entrer à toute vitesse. Soit je suis là pour les accueillir, soit je ne suis pas là. Je ne débarque pas au milieu de leur repas et en milieu de service. Enfin ça c'était en admettent qu'une bombe n'est pas explosée durant le début du service.
Dans les cuisines, tout semble aller... Disons moins pire que prévu, à défaut de bien ? L'équipe travaille, mais certains murmurent, tandis que d'autres affichent des mines sérieuses, préoccupées. Presque tout les sourcils sont froncés. Un coup d'oeil dans la pièce m'indique que tout les serveurs sont absents. Bonne chose, j'en déduis que le service n'est donc pas interrompue. Je m'approche de Kwon Joo Wan, le chef cuisinier et je n'ai pas besoin de parler pour qu'il comprenne immédiatement qu'il me faut un rapport de la situation. On se salue d'un signe de tête rapide. Puis enfin, on m'explique. Un client à fait un scandale dans la salle principale de restauration, refusant de manger le plat servit. Il remettrait en cause la qualité de nos produits, sans y avoir touché, prétextant que sa femme à été elle-même victime d'une grave indigestion et se trouve encore à l'hôpital. Je soupire. Il y a vraiment des gens idiots. Pourquoi venir manger dans un restaurant si on refuse de lui faire confiance. De plus, on parle de Samwon là. Samwon Garden, un des restaurants les plus huppés de la capitale Coréenne... Il croit vraiment que l'on prendrait le risque de nous compromettre si bêtement ?
Enfin bon... Je ne m'attends pas à grand chose, il suffira sûrement de l'écouter crier, le rassurer un peu et le tour sera joué. J'ignore la boule qui s'installe dans ma gorge à l'idée d'avoir quelqu'un d'énervé en face de moi. C'est mon boulot et je vais le faire comme il se doit.
Kwon Joo Wan m'annonce que le client à été amené dans mon bureau. Il était vraiment trop énervé et dérangeait le repas des autres clients. D'un mouvement de tête, j'approuve ce choix puis demande où est Lim Bo Ra. Restée avec le client. Mentalement, je prie pour qu'elle aille bien, certaines personnes pouvait vraiment devenir blessantes, même sans être aussi sensibles que moi on pouvait facilement être affecté par une agressivité inexpliquée et non contrôlée.
Je me rend donc dans mon bureau. Je ne frappe pas pour entrer, c'est de mon propre bureau qu'il s'agit après tout. Pas besoin d'être un expert en relation pour comprend que la situation est tendue. Le client et la serveuse se tiennent tout deux debout, l'un en face de l'autre, à quelques pas seulement. J'opte pour la solution qui me semble la plus judicieuse.
Je croise rapidement le regard de Bo Ra, lui faisant signe qu'elle peux rester. Je ne m'attarde pas sur elle, je vérifierai plus tard si elle va bien. Le plus important est d'installer dès le début un rapport de force face au client. L'amener à sentir mon grade, se reconsidérer et entrer dans une phase plus respectueuse.
Je traverse la pièce sans l'observer plus que de mesure, le visage détendu. Arrivée devant ma chaise, je le regarde poliment, j'incline la tête.
«
Bonjour. Je suis la Manager Seong. J'ai crue comprendre que vous désiriez me parler, n'est-ce pas ? Asseyez-vous, Monsieur... ? »
Polie voir agréable. Le but est de renvoyer une image extrêmement calme à mon interlocuteur pour qu'il puisse prendre conscience de sa propre démesure ; malheureusement, c'est une chance sur deux avec cette technique : soit l'individu se calme, soit le fait de se heurter à un mur d'indifférence l'énerve plus encore. C'est pourquoi je dois mêler à ce calme une part de compréhension, bien qu'à l'intérieur de moi, je désapprouve au possible son comportement.
Je jette un coup d'œil à Bo Ra, restée debout dans la pièce. Pas question de faire d'elle un élément externe à l'affaire. Qui plus est, elle ne doit pas être à l'aise ainsi... Je lui souris donc gentiment et désigne la chaise dans le coin de la pièce.
«
Asseyez-vous donc égallement, Lim Bo Ra. »
Mon ton est un brin plus chaleureux que celui que j'emploie pour le client. Pas que je la place au même niveau que lui. Mais je préfère éviter que le client est le sentiment que nous soyons deux contre un. C'est également pour ça que je désigne à Bo Ra le troisième bords du bureau. Pas de répartition des voix en fonction de l'emplacement, cela donne un faux sentiment de neutralité.
Puis je reporte mon attention sur le client.
«
Alors, Monsieur Choi. En quoi puis-je vous être utile ? »
Je prend bien soin de ne pas utiliser de mon à connotation négatif. « Problème » et « soucis » sont bannis de mon langage. Ça peut paraitre idiot, mais ça marche, cela influence souvent le sens de la conversation. J'ajoute à cela un sourire aimable et croisent mes jambes. Voyons donc qui de lui ou de moi trouvera les meilleurs arguments. Les paris sont ouverts ♥
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